La réconciliation est un voyage, pas une destination
À l'occasion de la Journée nationale de la vérité et de la réconciliation 2023, nous republions ce magnifique texte (publication initiale le 20 juin 2022).
Une aînée m’a déjà dit que la force de notre identité, comme membres des Premières Nations, vient du fait que nous parlons avec notre cœur et que, durant des milliers d’années, nous avons transmis notre savoir traditionnel, notre histoire et nos cultures par nos récits.
En tant que Déné originaire du Nord de la Saskatchewan, mes premiers souvenirs sont surtout liés aux journées passées sur des bateaux de pêche dans le Nord. C'est sur les vastes lacs d'eau douce du Nord de la Saskatchewan que mon père m'a appris à pêcher, à découper le poisson en filets et, vous l'aurez deviné, à trouver les meilleurs endroits pour pêcher (sans en révéler l’emplacement, bien entendu).
Mon père nous a élevées seul, mes sœurs et moi. C’est à l’âge de 29 ans qu’il a pris la décision déchirante de devenir le chef d’une famille monoparentale. À l'âge de 30 ans, il a décidé de poursuivre son rêve de toujours, celui de devenir un artiste et un peintre. Ma mère est une survivante des pensionnats, qui n'a jamais fini ses études secondaires et qui a passé toute sa vie dans le Nord. D’aussi loin que je me rappelle, ma famille a connu les dures réalités de la toxicomanie et du suicide.
En grandissant et en prenant conscience de ces disparités, j'ai voulu consacrer ma vie à l’amélioration de la situation des peuples autochtones du monde entier. À l'âge de 22 ans, j'ai été la première de ma famille à obtenir un diplôme universitaire. À l'âge de 23 ans, j'ai cofondé une association professionnelle autochtone nationale, dans le but de créer une main-d'œuvre plus diversifiée et inclusive partout au Canada. Au cours de la dernière décennie, j’ai eu le privilège de collaborer avec des chefs autochtones de l’Australie, de la Nouvelle-Zélande, du Pérou, du Mexique, des États-Unis et du Canada. J’ignorais où chacun des chapitres de cette aventure allait me mener, mais je savais au fond de moi que je voulais faire du monde un endroit plus équitable que celui dans lequel j’étais née.
Je me rappelle les propos d’un aîné : « Tu crées chaque jour des empreintes que l’on pourra suivre. Marche bien, c’est important. » J'ai eu la chance de suivre les traces créées par des leaders indigènes tels que les professeures Marie Battiste et Lorna Williams. Pour moi, le chemin de la réconciliation est le voyage de toute une vie : chaque jour, chaque pas, est un rappel de la responsabilité que nous avons envers la génération qui nous suit.
Mon parcours de réconciliation durera toute ma vie. Il implique l'apprentissage de ma langue, sur le territoire déné, l'approfondissement des relations de parenté par la guérison des traumatismes intergénérationnels. Alors que nous entamons la Décennie des langues autochtones des Nations Unies, nous avons l'impression que l'importance de ces questions fait l'objet d'une prise de conscience et d'une compréhension accrues. Mon espoir est de transformer cet élan en action.
Pour moi, le Mois national de l’histoire autochtone est l’occasion de réfléchir et de célébrer. J'espère que les Canadiens et les Canadiennes, d'un océan à l'autre, prendront toute la mesure de leur responsabilité partagée dans la réconciliation, réfléchiront à la terre sur laquelle ils se sont installés et apprendront à connaître les premiers gardiens de ce territoire. Alors que les Canadiens et les Canadiennes réfléchissent à leur responsabilité partagée dans la réconciliation, je leur demande de se souvenir de la sagesse des aînés et de réfléchir à leur propre parcours. Quelles empreintes sont-ils en train de créer ? Comment peuvent-ils « bien marcher » ?