La Journée mondiale de l’aide humanitaire

Le 19 août 2020 marque la onzième année de la Journée mondiale de l’aide humanitaire, une journée rendant hommage aux travailleurs humanitaires, ces vrais héros parmi nous, qui consacrent leur vie à aider les autres dans des circonstances parfois extrêmes. Cette année, alors que le monde lutte contre la pandémie de COVID-19, les organismes communautaires et humanitaires sont plus que jamais sollicités et essentiels.

 

L’importance de cette journée résonne particulièrement auprès de Diala Lteif, boursière 2018 de la Fondation Pierre Elliott Trudeau et originaire de Beyrouth, au Liban, là où ont eu lieu des explosions meurtrières le 4 août 2020. Selon Diala Lteif, dont la recherche doctorale porte sur les déplacements de populations engendrés par les conflits à Beyrouth, l’impact de la destruction d’un point de vue urbain n’est rien de moins que catastrophique.

 

« La perte du port est en soi un problème majeur puisque le Liban dépend des importations pour la plupart de ses produits essentiels. Dans les zones résidentielles, principalement Mar Mikhael, Geitawi, Gemayzeh et Karantina (qui est le quartier que j’étudie), l’impact doit être évalué différemment. Premièrement, l’explosion a entraîné la destruction majeure de centaines de bâtiments du patrimoine historique, une énorme perte culturelle pour le pays. Deuxièmement, et c’est le point le plus important, on estime que 80 000 foyers sont devenus invivables et que de nombreuses entreprises sont devenues inopérantes, provoquant ainsi le déplacement de plus de 300 000 personnes et/ou la perte de leur principale source de revenus. »

 

Lorsqu’on lui a demandé si les récents événements au Liban avaient confirmé les résultats de ses recherches au sujet du quartier de réfugiés à Beyrouth, Karantina, Diala Lteif répond :

« La réponse de secours actuelle a malheureusement confirmé mes recherches sur le quartier de la Quarantaine (Karantina). Abritant une population de la classe ouvrière à faible revenu, le quartier a été touché de manière disproportionnée par les destructions, et malgré cela, il continue d’être absent de la couverture médiatique et de l’envoi d’aide humanitaire. Historiquement, le quartier a été constamment marginalisé et séparé du reste de la ville, et la réponse à la crise actuelle vient démontrer à quel point ces politiques de marginalisation sont profondément enracinées. »

 

Dans un article publié récemment dans le Toronto Star, Diala Lteif explique l’historique de marginalisation de ce quartier. Celle-ci remonte à la fin de la Première Guerre mondiale et s’est accentuée dans les années 1960.

 

Selon Diala Lteif, l’explosion constitue une preuve supplémentaire de la corruption endémique au sein de l’élite dirigeante au Liban. Dans ce contexte malsain, elle invite les gens à la prudence alors qu’ils font des dons ou acheminent de l’aide aux partenaires communautaires.

 

« Je recommande certainement aux Canadien.ne.s qui souhaitent faire un don de passer par ces canaux de confiance. Cela dit, j’insiste sur le fait que le gouvernement canadien et ses alliés se concentrent sur les fonds de reconstruction à long terme plutôt que sur le secours à court terme. Maintenant que la majeure partie du nettoyage de la ville et des secours initiaux ont été apportés, il est important de se concentrer sur un plan de reconstruction équitable et durable, qui ira au-delà de l’urgence immédiate de la situation actuelle. »

 

Malgré l’explosion à Beyrouth, le soulèvement de la population, les changements au sein du gouvernement, la pire crise économique de l’histoire libanaise, et tout cela sur fond de pandémie de COVID-19, Diala Lteif demeure positive et pleine d’espoir pour son pays :

« Bien que la situation soit actuellement très sombre, cela pourrait également être vu comme un moment riche de possibilités et de reconstruction active. La conséquence la plus importante est peut-être la colère que cette catastrophe a suscitée, à juste titre, parmi la population libanaise. Ces derniers jours, nous avons assisté au renouvellement de la Révolution d’octobre libanaise. Les gens sont descendus dans la rue pour exprimer leur colère et exiger justice. Je crois en la colère. La colère peut être le carburant de véritables mouvements révolutionnaires. »

 

Les journées internationales s’avèrent des occasions de sensibiliser le public aux questions préoccupantes, de mobiliser la volonté politique et les ressources pour résoudre les problèmes mondiaux ainsi que de célébrer et de renforcer les réalisations de l’humanité.

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Diala Lteif

  • Boursier.e 2018
  • Ancien.ne
Diala Lteif (urbanisme, Université de Toronto) étudie comment, en s'installant à Beyrouth, les réfugiés et les déplacés internes au Liban se…